par Dogue-son » 23 Sep 2021, 12:12
La justice bruxelloise vient de frapper un gros coup avec l’inculpation par la juge d’instruction Laurence Heusghem de plusieurs anciens dirigeants du Sporting d’Anderlecht. Roger Vanden Stock (dont le conseil maître Kennes contacté par nos soins ne souhaite pas s'exprimer pour le moment) et Herman Van Holsbeeck sont inculpés pour faux, usage de faux, blanchiment d’argent et escroquerie alors que les charges à l'encontre de Christophe Henrotay sont uniquement faux et escroquerie.
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Jo Van Biesbroeck, l’ancien administrateur délégué du club, les avocats Luc Leleu et Wim Aerts (du cabinet "Clifford Chance") font aussi partie des personnes inculpées. Le parquet fédéral ne souhaite faire aucun commentaire.
C’est un dossier qui était passé relativement inaperçu entre l’enquête du " Footgate " à Hasselt et celle sur les agents (Henrotay, De Koster, Frenay) à Bruxelles. Mais on en avait presque oublié que tout avait démarré avec une plainte déposée par le Partizan Belgrade contre Christophe Henrotay dénonçant un manque à gagner dans le transfert de Aleksandar Mitrovic d’Anderlecht à Newcastle. Au fil de ses investigations, le parquet fédéral a détricoté une fameuse pelote de laine pour en arriver à découvrir certaines irrégularités dans la gestion du Sporting d’Anderlecht.
Marc Coucke, nouvel actionnaire du club, avait porté plainte en septembre 2019 après avoir remarqué des anomalies lors du rachat d’Anderlecht. En avril de la même année, il avait même déclaré à nos confrères du journal " Le Soir " que " chaque mois on découvre des cadavres dans les placards… "
En mars 2020, des perquisitions avaient eu lieu dans deux cabinets d’avocats liés à la revente du club.
En décembre 2017, Marck Coucke achète Anderlecht via sa société Alychlo. Il acquiert 74% des parts du club pour une somme estimée à 70 millions d’euros. Il y avait d’autres concurrents. Mais les actionnaires souhaitent plutôt vendre le club à Marc Coucke qu’à l’homme d’affaires anversois Paul Ghysens, celui-là même qui voulait installer le Sporting dans le nouveau stade national. Jo Van Biesbroeck, l’administrateur-délégué d’Anderlecht à l’époque, a été chargé par le CA de mener à bien l’opération de la vente du club. En toute discrétion, il a négocié avec Coucke et il lui demande, " in fine " de faire une offre majorée de 5 millions. Ce que Coucke acceptera, accompagné de son fidèle ami Joris Ide, à travers la S.A.Immobilière Bremhove.
L’agent Christophe Henrotay avait été mandaté par l’ancienne direction du club bruxellois pour trouver un repreneur. L’accord initial prévoyait qu’Henrotay devait toucher une commission de 10% du prix d’achat s’il trouvait un acquéreur, comme avec le potentiel acheteur russe (le nom d’Alicher Usmanov, l’ancien homme fort d’Arsenal, avait été cité), un moment pressenti, et amené par son entremise. Donc si le Sporting avait été acheté par exemple 100 millions, Christophe Henrotay aurait reçu une commission de 10 millions d’euros. Cet accord aurait été, d’après nos informations, modifié par les anciens dirigeants mauves, pour assurer à l’agent une commission de 3 millions d’euros… et ce, quel que soit l’acheteur, amené ou non par ses soins ! Loin de l’adage " pas de client, pas de commission ". Aux antipodes mêmes des pratiques habituelles pour un courtier en publicité ou un agent immobilier, par exemple.
Plus loin, les anciens dirigeants anderlechtois eurent l’idée saugrenue de laisser supporter 2 de ces 3 millions au nouveau propriétaire. Plus fort, et vraisemblablement afin de sécuriser la créance de l’agent envers la nouvelle direction, ils auraient rédigé une fausse convention (en l’antidatant), qui prévoyait, au bénéfice d’Henrotay, une commission forfaitaire de 2 millions sur le transfert sortant de Leander Dendoncker. Lequel a également déposé plainte contre Christophe Henrotay, par ailleurs, pour des commissions qui auraient été perçues par son agent à son insu
Outre ce qui ressemblerait à un faux et usage de faux, et à une escroquerie à l’encontre de Coucke, ce qui choque ici, c’est l’importance des sommes accordées par l’ancienne direction anderlechtoise à l’agent et ce, même, en l’absence de prestation effective (trois millions de commissions même si l’agent ne trouvait pas de repreneur !) et l’énergie déployée pour garantir le paiement de ces sommes, en les faisant supporter à un repreneur (en l’occurrence Marc Coucke) s’estimant dès lors légitimement grugé. Nul doute que les enquêteurs se sont penchés avec minutie sur ces arrangements dont le caractère économiquement irrationnel saute aux yeux ! C’est certainement ce volet de l’enquête qui justifie aujourd’hui les inculpations évoquées, dans une affaire qui est encore loin d’avoir livré ses secrets…
D’aucuns pourraient s’étonner de trouver une personnalité de la trempe de Roger Vande stock parmi la liste des inculpés. Mais, apparemment, le président anderlechtois, 79 ans aujourd’hui était parfaitement au courant de ce qui se passait dans son club.
Dans une lettre manuscrite qui fait partie du dossier, le président Roger Van den Stock avait d’ailleurs rappelé son soutien inconditionnel à Herman Van Holsbeek, avec lequel il avait travaillé pendant quinze ans et là nous citons des extraits du document.
" Dans un esprit de confiance, de loyauté, de probité et de respect mutuel. Dans toutes ses actions et décisions qu’il a prises et entreprise, j’ai toujours pu constater que M.Van Holsbeeck a agi dans l’intérêt du club et de ses actionnaires (….)"
Et concernant les commissions touchées par les agents
" Je puis donc confirmer que la politique de rémunération des intermédiaires faisait partie d’une vision stratégique du club. Nous avons toujours privilégié le montant net encaissé plutôt que de nous focaliser sur le niveau des commissions d’un intermédiaire ".
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